Reproduire le naturel jour après jour avec les résines composites dans le secteur antérieur

Grégory Camaleonte

Dossier spécial : Dentisterie esthétique au quotidien

AONews #13 - Octobre 2017


Les résines composites (RC) sont incontournables dans la pratique quotidienne du chirurgien-dentiste.

 

La réussite des restaurations en RC repose sur le respect de critères fondamentaux :

 

- respect de la biologie avec en premier lieu, le diagnostic pulpaire soigneusement établi et surtout pas négligé lorsqu’on colle sur vivant,

 

- pérennité des reconstructions,

 

- rétablissement de la fonction et de l’esthétique

 

Avant toute intervention, le praticien doit observer l’environnement de la dent à reconstruire à savoir les dents adjacentes, l’état du parodonte, l’occlusion, les combinaisons chromatiques, les lignes de contour, de transition ainsi que les états de surface qui seront à reproduire.

 

Fig. 1 : l’observation du bord incisal d’une incisive centrale met en évidence la présence d’une zone opalescente « encadrée » par les mamelons dentinaires et une extrémité caractérisée par son aspect blanc.

 

L’observation de l’organe dentaire à restaurer et de son environnement doit s’effectuer en réalisant des clichés photographiques dans le cadre d'un protocole simple et reproductible qui permettra d’analyser la structure interne de la dent et d’établir une cartographie colorimétrique avant de commencer le traitement.

 

On réalise 3 photos :

 

- sourire pré opératoire qui mettra en évidence un problème

 

- vue intra orale avec écarteurs, contrasteur et échantillon de teintier

 

- vue intra orale avec écarteurs, contrasteur et filtre polarisant afin d’éliminer les reflets spéculaires de l’émail et révéler la structure dentinaire

 

Fig. 2, 3, 4 : protocole photo pré opératoire mettant en évidence la restauration défectueuse sur la 11

 

D’autres méthodes de relevé de la couleur existent telles que le dépôt d’échantillons de RC photopolymérisées à la surface de la dent ou la réalisation de clichés calibrés à l’aide d’une charte de gris.

 

Fig. 5 : le dépôt d’échantillons de RC photopolymérisées à la surface de la dent est une autre méthode de relevé de la couleur.

 

Le relevé de la couleur permettra de relever les dimensions de la couleur que sont la luminosité, la chromaticité, les teintes intensives, les opalescents et les caractérisations.

 

L’observation de la forme est aussi primordiale et plusieurs paramètres sont à prendre en compte :

 

- la forme de contour qui délimite la largeur réelle de la dent

 

- les lignes de transition délimitant la largeur apparente de la dent

 

Fig. 6 : matérialisation de la ligne de contour et des lignes de transition

 

Les états de surface avec la macrogéographie et la microgéographie.

 

Fig. 7 : la reproduction des états de surface a conditionné l’intégration réussie de la restauration en RC sur la 21

 

Prise de conscience de la 3ème dimension de l’organe dentaire qui va donner son volume, observé en vue incisale.

 

Fig. 8 : la vue incisale nous informe sur le volume à reproduire

 

Une fois les relevés de forme et de couleur effectués, la confection de la restauration peut démarrer avec la pose du champ opératoire, préalable obligatoire en dentisterie adhésive.

 

Fig. 9 : la mise en place de la digue facile l’accès visuel et empêche la présence de fluide qui nuirait à la restauration

 

L’étape suivante est la préparation de la dent qui devra permettre non seulement un soutien de la RC mais aussi aider à l’intégration esthétique de la restauration. Elle consiste en une mise à plat des faces proximales et palatine/linguale et la réalisation d’un chanfrein vestibulaire lorsque nous sommes en présence d’une zone d’émail soutenu par de la dentine. La préparation devra être soigneusement polie par la suite
 

Fig. 10 : la préparation de la dent consiste en un chanfrein vestibulaire et une mise à plat palatine et proximale

 

La procédure d’adhésion succède à la préparation de la dent. Le sablage est la première étape et sera suivi par l’utilisation soit :

- d’un système dit MR3 : mordançage total, rinçage, séchage, primer en plusieurs couches et adhésif

- d’un système dit universel : mordançage sélectif de l’émail, adhésif universel

 

Fig. 11a, b, c : sablage, mordançage sélectif de l’émail, application d’un adhésif universel

 

Vient ensuite l’étape de stratification à proprement parler et devant ce challenge, 2 méthodes peuvent être utilisées :

- la méthode classique décrite par Vanini qui consiste en une superposition de couches de dentine de saturation décroissante

- la méthode simplifiée décrite par l’équipe de Style Italiano qui s’appuie sur la variation de la saturation causée par la modification de l’épaisseur d’un composite dentine.

 

Dans les 2 méthodes, la face palatine, les faces proximales et l’émail vestibulaire sont des étapes communes.



 

Voyons à travers un cas clinique, la réalisation d’une restauration en RC avec la méthode simplifiée. (Thuillier)

 

Fig. 1 a, b, c : protocole photographique pré opératoire montrant la restauration défectueuse sur la 11.

Fig. 2 : après mise en place du champ opératoire, l’ancienne restauration est déposée, la dent est préparée et la procédure de collage effectuée.

Fig. 3 : après construction de la face palatine et des faces proximales, le composite dentine est déposé et les excès sont éliminés à l’aide de l’instrument LM Arte Misura (Pred) afin d’aménager un espace libre de 0,5mm pour le composite émail vestibulaire.

Fig. 4 : 3 ans plus tard, l’intégration de la restauration en RC est satisfaisante.


L’étape ultime des restaurations en RC du secteur antérieur consiste à dégrossir, finir et polir. Il s’agit d’un moment primordial pour obtenir un résultat esthétique satisfaisant en conférant au composite un état de surface le plus proche possible de celui observé sur une dent naturelle en termes de contour, lignes de transition, macro et microgéographie. De plus, cela va permettre de garantir à la restauration sa pérennité dans le temps.

 

Fig. 5 : dégrossissage à la fraise gros grain sur contre angle à faible vitesse (15000 tour/min)

Fig. 6 : dessiner les lignes de transition sur la restauration et sur la dent facilite leur positionnement lors des finitions

Fig. 7 : brillantage à l’aide d’une meulette en feutrine

Fig. 8 : après finition et brillantage, les restaurations s’intègrent de façon satisfaisante

 

Un avantage important des restaurations en RC est la possibilité aisée de ré intervenir si besoin lors des rdv de maintenance ou si des défauts apparaissent sans avoir besoin de refaire la restauration entièrement.


 

Conclusion

 

L’utilisation des composites est d’un usage quotidien et les résultats pourront varier grandement d’un cas à l’autre ou d’un praticien à l’autre.

 

La réussite des restaurations en RC du secteur antérieur repose sur une méthodologie et une chronologie précises et à respecter : du diagnostic pulpaire, en passant par l’observation attentive, la mise en place du champ opératoire, la préparation, la procédure d’adhésion, la stratification et les finitions et le polissage, chaque étape devra être effectuée consciencieusement si on désire confectionner des restaurations hautement esthétique en étant peu invasif et surtout de façon reproductible.

 

Bibliographie :

- Vanini L, Mangani F. Determination and communication of color using the five dimensions colors of teeth. Pract Proced Aesthet Dent 2001; 13(1) : 19-26

- Devoto W, Saracinelli M, Manauta J. Composite in Everyday Practice: How to Choose the Right Material and Simplify Application Techniques in the Anterior Teeth. EJED vol 5. Number 1. Spring 2010.

- Camaleonte G. Technique simplifiée de stratification des résines composites. Information dentaire n°11 - 19 mars 2014

- Manauta J, Salat A. Layers : an atlas of composite resin stratification. Quintessence éditions. 2012

- Hein S, Bazos P, Tapia J. eLABor_aid: a new approach to digital shade management. Int J Esthet Dent 12 (2017), No. 2

- Janus J1, Fauxpoint G, Arntz Y, Pelletier H, Etienne O. Surface roughness and morphology of three nanocomposites after two different polishing treatments by a multitechnique approach.Dent Mater. 2010 May;26(5):416-25.