Considérations cliniques sur le comblement alvéolaire

Dossier AO News #62 L'alvéole, l'essentiel - Novembre 2023

Télécharger
4. Considérations cliniques sur le trait
Document Adobe Acrobat 5.5 MB


Introduction

 

Il est scientifiquement établi aujourd’hui que le phénomène de cicatrisation alvéolaire consécutif à l’extraction d’une dent s’accompagne d’une résorption osseuse tridimensionnelle (1). Pour pallier à ce problème pouvant impacter le futur remplacement de la dent par un implant, il convient de respecter deux points primordiaux :

- réaliser une extraction atraumatique de la dent pour préserver les parois alvéolaires (2) ;

 

- réaliser un comblement osseux à la suite de l’extraction permettant le soutien des parois alvéolaires (3).

Différentes techniques existent pour réaliser une extraction dentaire de manière atraumatique et permettant ainsi la préservation des parois osseuses alvéolaires. Nous allons nous focaliser sur l’une de ces techniques : l’utilisation de la piézochirurgie ou chirurgie osseuse piézoélectrique.

 

Le piézotome génère un concentré d’ultrasons permettant de réaliser des coupes micrométriques extrêmement précises et sécures, en évitant toute lésion accidentelle au niveau des tissus mous à la différence de l’utilisation des fraises rotatives. L’action microvibratoire permet de focaliser l’action de coupe au niveau des structures minéralisées uniquement. Elle permet de s’immiscer progressivement au niveau du ligament parodontal, entre la racine dentaire et la paroi alvéolaire.

Le respect de l’intégrité de l’ensemble des parois alvéolaires, quand cela est possible, est fondamental. Chaque paroi constitue une ressource en cellules ostéogéniques qui permettra la colonisation du caillot sanguin stabilisé et une régénération osseuse dans les meilleures conditions.

Lorsque nous effectuons une luxation de la dent pour permettre son extraction, nous exerçons des contraintes mécaniques importantes au niveau des parois alvéolaires entrainant une déformation élastique du tissu osseux, et dans une certaine limite, une déformation plastique pouvant conduire à une fracture de la table osseuse. L’insertion du piézotome au niveau du desmodonte permet de diminuer les contre-dépouilles osseuses au niveau de la dent et de « désolidariser » progressivement la racine dentaire de son alvéole.

La luxation dentaire à l’aide d’un élévateur peut alors s’effectuer en diminuant de façon très significative les forces mécaniques et donc le stress osseux s’exerçant sur les parois alvéolaires.

Le caractère atraumatique de l’extraction dentaire par préservation des parois alvéolaires permet d’éviter des reconstructions osseuses secondaires moins prédictibles et augmentant le temps de traitement, les suites opératoires et le coût pour le patient. En comparaison avec l’utilisation d’instruments rotatifs sur le tissu osseux, l’élévation de la température est diminuée, permettant de réduire le risque de nécrose du tissu osseux tout en préservant la structure alvéolaire. Les suites opératoires chez les patients après une extraction sont améliorées lorsque celles- ci sont réalisées avec un piézotome (4). De plus la piézochirurgie créé un phénomène de cavitation repoussant le sang grâce à l’irrigation améliorant ainsi la visibilité du champ opératoire.

 

Consécutivement à l’extraction dentaire, la mise en place d’un matériau de comblement osseux au sein de l’alvéole présente plusieurs intérêts (5) :

  •  jouer le rôle de mainteneur d’espace en soutenant les parois alvéolaires résiduelles et éviter leur effondrement ;
  • conserver le volume osseux initial présent, à la fois en hauteur et en épaisseur ;
  • apporter la trame minérale et organique constituant le tissu osseux pour améliorer et accélérer la cicatrisation osseuse ;
  • éviter des reconstructions secondaires ayant des résultats moins prédictibles.

Les substituts osseux font aujourd’hui partie intégrante de notre arsenal thérapeutique permettant de préserver le volume osseux directement après extraction. Ils permettent d’éviter les suites opératoires liées à un prélèvement osseux chez le patient pour réaliser une autogreffe et sont disponibles quantité « illimitée » à la différence du greffon prélevé chez le patient.

 

Ces propriétés constituent une avancée significative dans la réalisation de greffes osseuses. La structure de l’os animal est très similaire à celle de l’os humain ; ce qui n’est pas le cas à contrario des biomatériaux d’origine synthétique présentant des résultats cliniques moins satisfaisants.

Dans le cadre de notre pratique, nous utilisons un substitut osseux collagéné d’origine porcine montrant d’excellents résultats, reproductibles dans le temps, avec d’excellents résultats cliniques et simple d’utilisation.

Le laboratoire Tecnoss est l’un des premiers laboratoires ayant réussi à élaborer des substituts osseux d’origine animale biocompatible, tout en conservant la trame collagénique, protéine principale du tissu osseux et sans provoquer de réaction immunitaire chez l’homme.

La conservation de la matrice collagénique au sein même des granules de biomatériau présente de nombreuses propriétés biologiques favorables à la cicatrisation osseuse (6) :

- support favorable à l’agrégation et l’activation plaquettaire,

- agent chimiotactique et inducteur de la différenciation des cellules souches mésenchymateuses en provenance de la moelle osseuse,

- matrice en échafaudage favorable à la prolifération cellulaire et ainsi à la néoformation osseuse,

- contribution à la mise en place de l’angiogenèse (7).

 

La matrice biologique des substituts osseux OstéoBiol® a été soumise à des tests de biocompatibilité par l’université de Turin, ainsi que par des laboratoires accrédités au niveau international. Ces tests de biocompatibilité, ont permis l’obtention d’un certificat de norme ISO 13485 attestant de la qualité des dispositifs médicaux OstéoBiol® nécessaires à la mise sur le marché. La neutralisation de la composante antigénique présente dans l’os prélevé chez l’animal garantit une biocompatibilité optimale tout en conservant le collagène au sein-même des granules de biomatériau.

 

Le Gen-Os a été le premier biomatériau collagéné de la gamme. Conditionné sous forme de flacon, il est composé de granules d’os cortico- spongieux collagénés, dont la taille varie de 250 à 1000μm, et présente une activité ostéoconductrice élevée (8).

Son caractère progressivement résorbable induit une néoformation osseuse couplée à une résorption progressive du biomatériau tout au long de la cicatrisation osseuse. La trame collagénique présente au sein des granules de Gen-Os, constitue une matrice favorable au rapatriement cellulaire ainsi qu’à leur différenciation associée à leur prolifération.

L’activation du collagène composant les granules du Gen-Os, passe par une phase d’hydratation entrainant une expansion du volume des granules de 50%, grâce à son pouvoir hydrophile, ajouté à une augmentation du caractère adhésif du biomatériau. La présence de collagène à l'intérieur de chaque granule, procure au Gen-Os un caractère hydrophile et facilite en outre son mélange. Ce biomatériau peut ainsi être mélangé avec le sang du patient, ou du sérum physiologique pour faciliter sa manipulation. Il peut également être mélangé à du gel de collagène (TSV-Gel) ou à du PRF liquide pour augmenter de façon très significative la stabilité du biomatériau, par amélioration des propriétés adhésives.

Le mp3 est une évolution de ce concept et constitue un matériau de comblement osseux de même composition que le Gen-Os, mais dont les granules sont pré hydratées avec du gel de collagène à 10%, associé à une taille des granules légèrement plus importante (650 à 1000μm).

Le confort d’utilisation est amélioré grâce au conditionnement en seringue du fait de la présence de gel de collagène au sein du biomatériau. La phase d’hydratation, nécessaire pour le Gen-Os, ainsi que les erreurs de manipulation pouvant en découler, s’en trouvent ainsi évitées.

L’association du gel de collagène aux granules biphases, permet d’obtenir la consistance compacte et modelable du mp3 pouvant s’avérer très utile, comme par exemple dans les cas de comblement osseux alvéolaire avec présence d’une communication bucco-sinusienne. Le risque de migration du biomatériau en intra-sinusien est largement diminué grâce au caractère agrégé des granules. L’évolution du Gen-Os en mp3 a permis une avancée majeure : l’amélioration de la stabilité mécanique du substitut osseux, élément fondamental au succès clinique des reconstructions de défauts osseux ayant perdu une ou plusieurs parois alvéolaires.

 

Plus récemment, une évolution a été développé : le GTO. Ce matériaux développé depuis 2018, permet d’obtenir un biomatériau thermosensible et modelable.

Aux granules de granulométrie similaire au mp3 (600 à 1000 μm), ont été ajoutés un copolymère synthétique ainsi que des acides gras polyinsaturés. Ce matériau est conditionné sous forme de seringue, de viscosité importante, constituant un atout indéniable pour stabiliser le greffon dans la quasi-totalité des situations cliniques. Les propriétés adhésives étant améliorées, il constitue alors, un atout significatif pour la réalisation de greffes d’apposition osseuse.

Son caractère thermosensible lui permet de durcir au niveau du site à reconstruire. La stabilité mécanique est largement améliorée par rapport au Gens et au mp3.

Bibliographie :

1. Alveolar ridge resorption after tooth extraction: A consequence of a fundamental principle of bone physiology - PMC [Internet]. [cité 26 juin 2022]. Disponible sur: https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/ PMC3425398/

2. The preservation of alveolar bone ridge during tooth extraction - PubMed [Internet]. [cité 26 juin 2022]. Disponible sur: https:// pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22617329/

3. Alveolar ridge sockets preservation with bone grafting--review - PubMed [Internet]. [cité 26 juin 2022]. Disponible sur: https:// pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/19127813/

4. Comparative evaluation of surgical outcome after removal of impacted mandibular third molars using a Piezotome or a conventional handpiece: a prospective study - PubMed [Internet]. [cité 26 juin 2022]. Disponible sur: https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/22088359/

5. Barone A, Aldini NN, Fini M, Giardino R, Calvo Guirado JL, Covani U. Xenograft versus extraction alone for ridge preservation after tooth removal: a clinical and histomorphometric study. J Periodontol. août 2008;79(8):1370-7.

6. Giuliani A, Iezzi G, Mazzoni S, Piattelli A, Perrotti V, Barone A. Regenerative properties of collagenated porcine bone grafts in human maxilla: demonstrative study of the kinetics by synchrotron radiation microtomography and light microscopy. Clin Oral Investig. janv 2018;22(1):505-13.

7. Rombouts C, Jeanneau C, Camilleri J, Laurent P, About I. Characterization and angiogenic potential of xenogeneic bone grafting materials: Role of periodontal ligament cells. Dent Mater J. 2016;35(6):900-7.

8. Falacho RI, Palma PJ, Marques JA, Figueiredo MH, Caramelo F, Dias I, et al. Collagenated Porcine Heterologous Bone Grafts: Histomorphometric Evaluation of Bone Formation Using Different Physical Forms in a Rabbit Cancellous Bone Model. Mol Basel Switz. 2 mars 2021;26(5):1339.

 

Retour au Dossier AO News #62 L'alvéole, l'essentiel - Novembre 2023

 

Retour à l'accueil