Le collage sur la dent dépulpée : quand et comment ?

Dossier Reconstruire la dent dépulpée - AO News #63 Décembre 2023

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Introduction

 

La restauration de la dent dépulpée représente aujourd’hui un challenge pour de nombreux praticien. Depuis plusieurs décennies l’inlay core suivi de la mise en place d’une couronne scellé représente le gold standard. Cette stratégie thérapeutique entraine un délabrement tissulaire important tant d’un point de vue coronaire que radiculaire et n’est pas sans risque pour l’organe dentaire (Fig. 1).

 

La réintervention dans certaines situations peut devenir délicat et les risques de factures radiculaires importants (Fig. 2).

Depuis le développement des thérapeutiques adhésives la restauration de la dent dépulpée ne passe plus aujourd’hui systématiquement par la réalisation d’un ancrage radiculaire. Et si on en profitait pour coller ? Coller avant ou après le traitement endodontique ? Et si ce collage était finalement double ? Cet article au travers de cas cliniques a pour objectiver d’illustrer l’apport du collage dans la gestion de la dent dépulpée


Un collage pré endodontique

 

Face à un délabrement tissulaire modéré, la restauration d’une dent dépulpée peut être réalisée en technique direct.

Le collage pré endodontique dans cette situation répondra à plusieurs objectifs.

  • Réaliser une reconstitution pré endodontique : étape indispensable avant de réaliser un traitement endodontique. Cette reconstitution à 4 parois servant de réservoir pour la solution d’irrigation.
  • Renforcement des structures dentaires  : en cas de perte d’une des structures de résistance de la dent, le composite pré endodontique renforcera la structure dentaire résiduelle.  Permettant en cas de temporisation si le traitement ne peut être réalisé dans la même séance d’éviter une fracture de la structure dentaire .
  • Réaliser une hybridation dentinaire immédiate : permettant d’obtenir de meilleures valeurs d’adhésion.

Ce collage pré endodontique est réalisé au composite sous champ opératoire après réalisation de la cavité d’accès. L’utilisation d’aide optiques (loupes ou microscopes) associé à un révélateur de carie permet de s’assurer d’une éviction complète des lésions carieuses et des anciennes obturations. Afin d’obtenir une adhésion optimale un sablage sous alumine 27 microns permet d’obtenir un nettoyage complet de la surface dentaire. Lors d’un traitement initial sur dent vivante la réalisation d’une pulpectomie préalablement a cette reconstitution peut s’avérer nécessaire afin d’éliminer complétement le saignement provenant des canaux pouvant être à l’origine d’une contamination lors de la procédure de collage.

 

Le cas ci-dessous (Fig. 3) illustre la réalisation d’une reconstitution pré endodontique au composite Geanial Posterior sur une prémolaire maxillaire. La perte de substance minime ne touchant que la crête marginale distale nous oriente vers une restauration directe au composite après traitement endodontique. Une RCPE étant nécessaire il a été décidé de la réaliser directement au composite. Ce composite pré endodontique étant à visé définitive il est primordial de s’assurer de l’obtention d’un point de contact (utilisation d’un système de matriçage Garrisson). Une fois le traitement endodontique terminé le reste de la cavité sera obturé au composite dans la même séance.

Les deux cas cliniques (Fig. 4 et 5) suivants illustrent la reconstitution au composite de dents dépulpées.

 


En cas de dommage tissulaire plus important (perte des 2 crêtes marginales, perte d’une cuspide), la reconstruction en technique directe n’est pas nécessairement indiquée ou techniquement plus difficile à réaliser. Néanmoins les techniques adhésives nous permettent aujourd’hui de nous affranchir dans de nombreuses situations d’un ancrage radiculaire. Le composite pré endodontique aura un objectif supplémentaire : relocaliser la marge cervicale .

 

Les auteurs insistent sur la nécessité d’obtenir une isolation parfaite lors de la réalisation de cette procédure . Tout en facilitant les étapes d’empreinte puis d’assemblage, la remontée de marge facilitera le contrôle de l’adaptation de la restauration d’usage. Julosky et al et Grubbbs et al dans leurs articles ne montrent pas de différence significative entre un composite de restauration et un composite flow en termes d’étanchéité. Certains auteurs  préconisent même l’utilisation d’un composite flow chargé afin d’améliorer l’adaptation marginale tout en limitant la perte d’étanchéité et l’apparition de micro-gap.

Le dernier cas clinique (Fig. 6) illustre cette thérapeutique. Une patiente se présente en consultation pour le traitement de sa dent 15. Une symptomatologie pulpaire est présente et un traitement endodontique est indiqué. Le délabrement tissulaire important nous oriente dès le départ vers une restauration indirect de type overlay. Après mise en place du champ opératoire, éviction du tissu carieux les limites palatine et proximale distale sont assez basses. Le composite pré endodontique permettra de réaliser une remontée de marge. Son rôle est double tout en permettant de réaliser un traitement endodontique dans des conditions optimales (4 parois) il nous facilitera par la suite les étapes d’empreinte puis d’assemblage de la restauration indirecte. L’utilisation d’une matrice circonférentielle (Automatrix) permet d’obtenir une adaptation cervicale optimale tout en s’affranchissant d’utiliser un coin de bois pouvant être à l’origine dans ces situations d’un profil d’émergence inadéquate. Après traitement endontique le reste de la cavité est obturé (dans ce cas il a été associé du composite flow et du composite fibré) et la préparation pour l’overlay effectué. Le collage de cette dernière est effectué au composite réchauffé .

Un collage post endodontique

 

Une fois le traitement endodontique réalisé, les thérapeutiques adhésives nous permettent aujourd’hui d’envisager une restauration de la dent dans la même séance. Cette restauration peut être un composite direct ou bien une reconstitution indirecte avec ou sans ancrage radiculaire. Dans tous les cas un nettoyage méticuleux de la surface dentaire est nécessaire afin éliminer toute trace de matériaux d’obturation. L’eugénol contenu dans les ciments permettant une obturation à chaud diminuant les valeurs d’adhérence un sablage est obligatoire pour envisager un collage dans la même séance. L’apparition de nouveau ciment biocéramique ne contenant pas de produit limitant l’adhésion représente une alternative au ciment d’obturation à base d’oxyde de zinc eugénol. Lorsqu’un ancrage radiculaire est nécessaire l’utilisation de tenons fibrés est indiqué. Un article sur ce sujet est présenté dans la revue nous ne nous étalerons pas sur cette procédure dans cet article.

 

Lorsque le délabrement tissulaire ne permet pas une reconstitution directe mais ne nécessite pas d’ancrage radiculaire, il est possible de procéder à un comblement de la cavité d’accès au composite.  L’association d’un composite flow chargé (GC injectable flow) déposé au niveau des entrées canalaires puis d’un composite fibré (Ever Postérieur) utilisé en un seul apport recouvert à son tour de composite flow chargé représente une solution thérapeutique. Le composite flow permettant d’éviter la formation de bulle au contact de la gutta percha. L’Ever X permettant quant à lui grâce à sa structure fibrée de limiter le risque de propagation des fissures dans la dent. Ce dernier ne tolérant pas l’humidité il est impératif de le recouvrir de composite.

Ce cas clinique (Fig. 7) illustre cette thérapeutique. Après réalisation d’un retraitement endodontique sur la dent deuxième prémolaire maxillaire droite , cette dernière ne nécessite pas d’ancrage radiculaire. Cependant les parois coronaires étant fines il est nécessaire de renforcer sa structure. L’association du composte flow charge et du composite fibré permet de répondre à ces objectifs.

L’apport de l’outil numérique 

 

Depuis plusieurs années l’outil numérique occupe une place de plus en plus importante dans le domaine dentaire. La CFAO ([1]) directe permet aujourd’hui de réaliser des restaurations d’usage au cabinet en s’affranchissant des étapes de laboratoire. La littérature insiste sur la notion d’étanchéité post endodontique. Afin d’assurer la pérennité de nos traitements endodontique la reconstitution coronaire joue un rôle primordial. L’outil numérique nous permet aujourd’hui de répondre à cet objectif mais aussi d’aller encore plus loin, en offrant la possibilité à nos patients de restaurer leur dent dans la même séance. Le gain est alors double : pour le patient en limitant le nombre de rendez-vous au cabinet et pour le praticien en réduisant le risque de recontamination du traitement endodontique inhérent lors des différentes phases de temporisation.

Le cas clinique suivant (Fig. 8) illustre l’apport de l’outil numérique dans ce type de thérapeutique. Après réalisation d’un retraitement endodontique sur la deuxième prémolaire maxillaire gauche (Dent 25) , la reconstitution corono radiculaire suivi de la réalisation d’une couronne en Emax sont effectué dans la même séance.

 

Pour répondre à cet objectif un temps par temps précis doit être suivi.

  • Une empreinte préalable du secteur à réhabiliter (ici le secteur 2) est effectué avant de débuter le soin. Une empreinte de l’arcade antagoniste est aussi réalisée. L’occlusion peut être enregistré à ce moment ou plus tard.
  • La mise en place du champ opératoire plural est indispensable, il nous permettra par la suite de réaliser une seconde empreinte optique sous digue.
  • Après reprise du traitement endodontique et réalisation de la reconstitution corono radiculaire (dans ce cas au composite) la dent est préparée.
  •       Une deuxième empreinte optique est effectuée (Fig. 8bis). Pour ce faire l’empreinte optique initiale est découpé uniquement au niveau de la dent 25. La dent préparée est alors de nouveau enregistrée grâce à la caméra optique. La mise en place du champ opératoire plural permettant à la caméra optique de se repérer (grâce aux autres dents) lors de cette deuxième numérisation. La réalisation d’une empreinte optique sous champ opératoire en rétractant les tissus mous, éliminant les fluides salivaires et accentuant le contraste avec la dent permet de faciliter l’enregistrement des limites de la préparation.

  • la pièce est ensuite usinée directement au cabinet puis maquillée et passée au four avant l’assemblage par collage sous champ opératoire au composite réchauffé

Pour les praticiens ne possédant pas d’usineuse au cabinet mais uniquement une empreinte optique. Le protocole reste identique, la réalisation de la pièce prothétique est déléguée au laboratoire à partir des fichiers stl exporté depuis le cabinet . L’assemblage de la restauration s’effectuant dans un second temps. Le dernier cas clinique (Fig. 9) illustre la conception d’un overlay sur 46 à l’aide du logiciel Exocad au laboratoire à partir d’une empreinte optique sous digue. Ce dernier est ensuite assemblé sous digue au composite réchauffé.

 

Bibliographie :

 

 

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