Introduction
Les implants sous-périostés, plus récemment appelés AMSJI (Additively Manufactured Sub Periosteal Jaw Implants) par certains auteurs (1), représentent un concept innovant d’implants réalisés sur mesure et par CFAO. Ils épousent parfaitement l’anatomie de la crête chez des patients dont les volumes osseux sont insuffisants pour la pose d’implants endo-osseux classiquement décrits par l’implantologie axiale. Ce concept, existant pourtant depuis plus de 80 ans, prend un tournant significatif grâce à l’avènement des outils numériques.
En perfectionnant sa technique de conception et en améliorant considérablement sa précision d’adaptation, il augmente son taux de succès et devient ainsi une option thérapeutique pertinente qui mérite notre attention.
Complexité de la région mandibulaire postérieure
L’atrophie des secteurs postéro-mandibulaires a toujours constitué un véritable défi dans nos procédures de réhabilitations. Les différentes solutions thérapeutiques sont conditionnées par de nombreux paramètres.
Pour compenser ces nombreuses contraintes anatomiques, diverses approches ont été développées.
Procédure dé réalisation des implants sous-périostés
Planification et conception des implants Panthera
Après sélection d’un patient ne présentant aucune contre-indication à la chirurgie buccale, l’élaboration des implants Panthera nécessite le recueil de trois données pré-implantaires :
Les fichiers Dicom et STL sont transférés sur la plateforme en ligne Panthera, une fois la commande passée, une visionneuse vous permet de suivre et valider les étapes de réalisation des implants (Fig. 3)
La modélisation des implants est entreprise par les designers de la société à l’aide de leur logiciel propriétaire en s’adaptant au cas clinique et en respectant une structure commune. Du côté vestibulaire, l’exosquelette contourne le foramen mentonnier, tandis que des vis d’ostéosynthèse positionnées plus en postérieur stabilisent l’implant sur la corticale de la ligne oblique externe. Une boucle prolonge et termine la structure sur la face externe de la branche montante. En lingual, l’armature forme une boucle dans la région rétro-symphysaire et s’arrête au niveau du pilier le plus distal en restant coronaire à la ligne mylo-hyoïdienne (Fig. 4)
L’évolution des matériaux, le développement des outils numériques et l’amélioration des techniques de production, ont permis à la société Panthera de fabriquer des implants sous périostés à partir de disques de titane grade 23 (6AL 4V ELI) grâce à des usineuses 5 axes d’une précision de 5 mm. Enfin l’état de surface est modifié par sablage dans les zones en contact avec l’os et le périoste afin de favoriser la régénération osseuse. (10) (11)
Les implants sont livrés accompagnés d’un modèle 3D de la mâchoire imprimé en résine. Ce modèle permet de contrôler la parfaite adaptation des implants avant leur mise en place. De plus, il aide l’opérateur à trouver l’axe d’insertion idéal, qui doit être réalisé en effectuant une translation distale suivie d’une rotation mésio-linguale mais diffère d’un patient à l’autre. (Fig.5)
Protocole chirurgical
L’intervention est réalisée sous anesthésie locale et dure en moyenne entre 2h et 3h. La première étape consiste à élever un lambeau suffisamment large pour permettre un accès adéquat au site opératoire. L’incision crestale est menée de manière à répartir équitablement la gencive attachée de chaque côté des futurs piliers. Elle se prolonge aux dents antérieures par une incision intra-sulculaire et se termine le long du bord antérieur de la branche montante.
L’objectif est de réaliser des lambeaux de pleine épaisseur afin de mettre en évidence le foramen mentonnier et de protéger le pédicule alvéolaire inférieur du côté vestibulaire. Le décollement doit ensuite se poursuivre au-delà de la ligne oblique externe jusqu’au rebord basal de la mandibule. Puis jusqu’à l’insertion du muscle buccinateur sans le détacher.
Du côté lingual, il est également important de refouler la loge sublinguale en décollant, toujours en épaisseur totale, jusqu’à la ligne oblique interne en postérieur et apicalement jusqu’à la fosse digastrique antérieure, en évitant une effraction du muscle mylohyoïdien et les apophyses géni. (Fig. 6 et 7) (12)
Avant d’insérer les implants, une technique de « soft brushing » peut être utilisée pour relaxer les lambeaux et permettre ensuite une fermeture du site sans tension tout en préservant le périoste. Puis une rugination de l’os est réalisée pour garantir l’élimination de tout tissu fibreux résiduel. L’implant est inséré selon l’axe préconisé et validé en amont sur le modèle en résine. Il est recommandé de laisser les piliers de cicatrisation en place et d’utiliser une pince hémostatique pour faciliter la préhension de l’implant, tout en restant à distance de la portion sous-gingivale pendant la procédure de mise en bouche. (Fig. 8, 9 et 10)
Lorsque la position et l’adaptation ont été soigneusement contrôlées, l’implant est stabilisé à l’aide de deux vis d’ostéosynthèse. Un guide de forage est également fourni pour faciliter la procédure (Fig. 11). Dans le même temps opératoire, deux implants endo-osseux sont placés en position 34 et 44.
Des membranes de PRF sont positionnées pour optimiser la cicatrisation gingivale (Fig. 12). Enfin, les lambeaux sont suturés sans tension à l’aide de points matelassiers apicaux et crestaux.
Étapes prothétiques
Après 4 mois d’ostéointégration, le deuxième temps chirurgical nous permettra de découvrir les implants enfouis, et un délai de maturation gingivale autour des piliers de cicatrisation de 15 jours sera respecté avant d’entreprendre les étapes prothétiques (Fig. 13).
Les piliers trans-gingivaux des implants sous périostés sont similaires à ceux utilisés pour les implants endo-osseux. Il s’agit de piliers coniques destinés à recevoir une prothèse fixe solidarisée et transvissée. Les étapes de réalisation de la prothèse d’usage sont donc les mêmes que celle des techniques conventionnelles :
Conclusion
La réhabilitation des secteurs postéro-mandibulaires atrophiques, représente un véritable défi chirurgical. Dans certaines situations cliniques, les limites des thérapeutiques implantaires et de reconstructions osseuses peuvent être atteintes.
Grâce à l’évolution accrue des technologies CAD/CAM associée à l’augmentation de la précision des CBCT, la solution sous-périostée devient une réelle alternative thérapeutique. L’utilisation d’implants sous-périostés, grâce à leur chirurgie unique sans apport osseux, constitue une approche minimalement invasive.
Les suites post opératoires et les risques de complications sont ainsi réduits. Et les délais de cicatrisation avant réhabilitation prothétique sont également diminués pour le patient.
Cette solution, qui a vu le jour il y a plus de 80 ans, se présente aujourd’hui sous un nouveau visage, plus abouti et plus biocompatible que son homologue historique, avec des résultats fiables et prometteurs.
Bibliographie
1. Mommaerts, M. Y. Additively manufactured sub-periosteal jaw implants. International journal of oral and maxillofacial surgery, 2017, vol. 46, no 7, p. 938-940.
2. Le Bars, Pierre, Kouadio, Ayepa Alain, Niagha, Gaston, et al. Prothèse amovible et pertes de substance des maxillaires : une association incontournable.
3. Keller Pierre, La gestion des tissus mous après les augmentations osseuses, Réalités Cliniques n°3 – Septembre 2018 (page 205-213)
4. Urban, Istvan A., Nagursky, Heiner, Lozada, Jaime L., et al. Horizontal ridge augmentation with a collagen membrane and a combination of particulated autogenous bone and anorganic bovine bone-derived mineral: a prospective case series in 25 patients. International Journal of Periodontics &Restorative Dentistry, 2013, vol.33, no 3.
5. Khoury, Fouad, Hanser, Thomas, et al. Three-dimensional vertical alveolar ridge augmentation in the posterior maxilla: a 10-year clinical study. Int J Oral Maxillofac Implants, 2019, vol. 34, no 2, p. 471-480.
6. Scortecci, Gérard M. et Odin, Guillaume. Evidence-based basal implantology. Basal Implantology, 2019, p. 69-85.
7. Davidowitz, Gary Et Kotick, Philip G. The use of CAD/CAM in dentistry. Dental Clinics, 2011, vol. 55, no 3, p. 559-570.
8. Janeva, Nadica Mihajlo, Kovacevska, Gordana, Elencevski, Saso, et al. Advantages of CAD/CAM versus conventional complete dentures-a review. Open access Macedonian journal of medical sciences, 2018, vol. 6, no 8, p. 1498.
9. Truitt, Harold P., James, Robert, et Boyne, Phillip. Noninvasive technique for mandibular subperiosteal implant: a preliminary report. The Journal of prosthetic dentistry, 1986, vol. 55, no 4, p. 494-497.
10. Cohen, David J., Cheng, A., Kahn, A., et al. Novel osteogenic Ti-6Al-4V device for restoration of dental function in patients with large bone deficiencies: design, development and implementation. Scientific reports, 2016, vol. 6, no 1, p. 20493
11. Claffey, Noel, Bashara, Haitham, O'reilly, Peter, et al.Evaluation of New Bone Formation and Osseointegration Around Subperiosteal Titanium Implants with Histometry and Nanoindentation. International Journal of Oral & Maxillofacial Implants, 2015, vol. 30, no 5.
12. Poitras Y. Diagnostic et plans de traitement [Internet]. Institut Canadien d’implantologie. 2021. Disponible sur: https://institutimplant.com/formations/formation-professionelle- continue/cad-cam-subperiosteal-implant-fr/diagnostic-et-plans-de-traitement/