Introduction
Depuis le milieu des années 1990, il a été décrit différents protocoles cliniques et de laboratoire intégrant la CFAO (Conception et Fabrication Assistées par Ordinateur) dans le traitement de l’édentement complet par prothèse amovible, essentiellement dans le but de diminuer la durée du traitement 1.
Ainsi initialement, en complément d’étapes cliniques conventionnelles, une assistance numérique à la conception et à la fabrication d’une PAC a été décrite en utilisant des logiciels développés pour permettre de proposer un montage de dents artificielles supportées par une base prothétique virtuelle comportant des alvéoles. Après avoir imprimé ou usiné cette base en cire ou en résine, des dents artificielles du commerce étaient secondairement collées. Une rectification complémentaire par usinage était parfois nécessaire pour éliminer le talon des dents qui dépassaient au niveau de l’intrados prothétique 2.
Depuis cette période, de nombreuses évolutions ont été proposées pour modifier ces protocoles afin d’optimiser cette assistance numérique dans le traitement prothétique, tant en clinique qu’au laboratoire.
Après avoir rappelé succinctement les étapes cliniques qui conduisent à la réalisation d’une prothèse amovible complète conçue et fabriquée à l’aide d’une assistance numérique, les avantages et les limites de ces protocoles seront précisés.
Assistance numérique dans le traitement par PAC : de la clinique…
Dans la quête d’un flux numérique le plus continu possible dans le traitement par PAC, quelques tentatives ont été décrites pour utiliser l’empreinte optique en remplacement des empreintes physiques primaire mucostatique, et secondaire anatomo fonctionnelle.
Concernant l’empreinte primaire, l’utilisation d’une caméra intra orale a conduit initialement à quelques essais infructueux liés à la difficulté d’enregistrer une surface édentée dont la topographie gingivale était trop uniforme pour permettre un recalage des images successivement enregistrées.
Avec les évolutions des algorithmes des scanners intra oraux actuels, il est désormais possible d’enregistrer la surface de la crête édentée maxillaire ou mandibulaire et ainsi permettre la réalisation d’un Porte Empreinte Individuel (PEI) (Fig.1).
Même si dans certaines situations cliniques favorables, il a pu être décrit l’utilisation d’une empreinte optique seule pour réaliser une PAC à assistance numérique 3, une récente revue systématique de la littérature4 souligne qu’il est impossible d’enregistrer la situation de tissus gingivaux mobiles et donc de déterminer une limite périphérique fonctionnelle de la base prothétique avec un scanner intra oral. Une empreinte secondaire anatomo fonctionnelle à l’aide de différents matériaux d’empreinte et d’un PEI s’avère encore indispensable (Fig.2 a à d).
Puis, dans la quasi-intégralité des situations, les modèles secondaires maxillaire et mandibulaire issus de coulées en plâtre de ces empreintes secondaires permettent la réalisation de maquettes d’occlusion. La numérisation des modèles peut permettre d’imprimer les bases en résine de ces maquettes d’occlusion en utilisant un logiciel de CAO (Conception Assistée par Ordinateur) généralement associé au scanner de laboratoire utilisé.
L’orientation du plan d’occlusion par rapport au plan de camper, ainsi que son parallélisme avec la ligne bi pupillaire dans le plan frontal sont vérifiés cliniquement et les repères anatomiques (situation de l’axe sagittal médian, des ailes du nez et de la ligne du sourire) sont marqués sur le bourrelet maxillaire. L’utilisation d’un arc facial permet de transférer la position du modèle maxillaire sur un articulateur selon les caractéristiques anatomiques spécifiques du patient.
Puis le Rapport Inter Maxillaire (RIM) est enregistré de manière classique en solidarisant les bourrelets antagonistes en relation centrée, à la Dimension Verticale d’Occlusion (DVO) déterminée (Fig.3 a et b)
Afin de raccourcir le nombre de ces séances cliniques, il a été proposé de réaliser plus ou moins simultanément les empreintes et l’enregistrement du RIM à l’aide de dispositifs préfabriqués, développés dans le cadre de protocoles cliniques spécifiques proposées par différentes sociétés commerciales. Ces dispositifs (Gnathometer CAD Ivoclar Vivadent, AMD AvaDent) sont solidarisés aux PEIs imprimés par CFAO, et après avoir réalisé les empreintes secondaires, permettent d’enregistrer un tracé intra oral facilitant l’enregistrement du RIM à la DVO choisie 5-7.
Ainsi, dans le protocole 3D Bite Plate (Ivoclar Vivadent) adapté pour être intégré dans le flux numérique Ivotion Digital Denture, il est décrit l’utilisation d’un instrument (Centric Tray) (Fig.4 a et b) permettant d’enregistrer une ébauche du RIM qui, une fois numérisée, facilite
la conception virtuelle des bourrelets d’occlusion et la mise en place d’un système de point d’appui central préfabriqué (Gnathometer CAD) afin de finaliser l’enregistrement du RIM en relation centrée. D’une apparente facilité, ces modalités de traitement demandent une expérience tant du prothésiste de laboratoire que du clinicien, les paramètres induisant des potentielles erreurs du montage ultérieur des dents prothétiques étant nombreux et difficiles à contrôler simultanément (soutien labial insuffisant, dimension verticale d’occlusion sous ou sur évaluée, situation erronée du milieu inter incisif ou du plan incisif, erreur de rapport d’occlusion, rétention insuffisante).
… au laboratoire
A ce stade, les modèles secondaires sont numérisés individuellement. Un autre fichier numérique au format .stl correspondant aux deux modèles agrégés par l’intermédiaire du dispositif d’enregistrement du RIM utilisé est également réalisé.
Que l’on utilise un logiciel spécifique d’un protocole propriétaire (AvaDent, Baltic, Ivoclar) ou une option d’un logiciel de CAO associé à un scanner de laboratoire (3 Shape, Dental Wings, Exocad), la procédure de conception numérique repose ensuite sur les étapes suivantes (Fig.5 a à g).
Quelques rectifications de cette maquette peuvent être effectuées cliniquement, généralement par soustraction. Les maquettes modifiées doivent être numérisées afin d’intégrer les rectifications dans le flux numérique de conception de la PAC.
- L’ensemble des informations enregistrées sous la forme d’un fichier numérique est transféré sur une machine-outil à commande numérique, le plus fréquemment une usineuse, laquelle va permettre la mise en forme du matériau. Le volume de la prothèse est positionné virtuellement dans le bloc de matière à usiner et différents étais sont créés afin de maintenir quelques points d’ancrage de la prothèse dans le disque de matériau après usinage (Fig.6 a à j).
Avantages et limites de ce protocole de traitement assisté par informatique en PAC
Par rapport à un protocole conventionnel de traitement et de réalisation d’une PAC, la littérature récente rapporte de nombreux avantages et quelques limites notables qui doivent être apportées au débat.
La réduction de la durée totale de traitement
C’est un avantage mis en avant par les sociétés ayant développé des protocoles de traitement ou la réduction des étapes cliniques est permise par un matériel spécifique combinée avec un logiciel de CFAO « propriétaire ».
En fonction des protocoles proposés (Avadent Digital CD protocol, Baltic Denture System, Vita Vionic Digital System, Zirkonzahn Denture System, Ivoclar Ivotion Digital Denture System) de 2 à 5 séances cliniques ont été décrites7. Dans les protocoles en 2 séances, une séance unique est consacrée à l’empreinte, au RIM et au choix de la teinte des dents prothétiques, la deuxième consistant en l’insertion de la prothèse terminée. Avec cette chronologie de traitement, aucune étape d’essayage clinique du projet virtuel à l’aide d’une maquette ou gabarit n’est prévue avant usinage et insertion finale.
Dans une étude clinique portant sur 7 patients traités par PAC réalisées selon un protocole numérique, Lo Russo et Salamini8 signalent que 5 séances au fauteuil s’avèrent néanmoins nécessaires pour réaliser ce type de thérapeutique assistée numériquement.
Pour ces auteurs, en termes de durée totale de traitement, 90 minutes de temps clinique sont nécessaires associés à 50 minutes de laboratoire et 270 minutes d’usinage des 2 PAC avant collage des dents artificielles et polissage.
D’après Srinivasan et Coll.9, un protocole de traitement clinique et de laboratoire par PAC numérique en 2 étapes cliniques est plus économique qu’un traitement conventionnel en 6 séances cliniques même si le coût en matériel s’avère significativement plus important dans le protocole numérique.
Pour de nombreux auteurs il apparait clairement la nécessité d’une séance d’essai clinique avec validation par le patient, à l’aide d’un gabarit d’essayage imprimé correspondant au projet virtuel de la PAC. Une validation esthétique de la forme et de la situation des dents prothétiques associées à la vérification de la DV et du RIM s’imposent. A défaut, le praticien s’expose au risque d’une réfection finale partielle ou totale de la prothèse numérique usinée, compromettant d’autant l’économie de temps et de coûts attendues avec ce protocole numérique 10.
Concernant spécifiquement la fabrication au laboratoire, les étapes artisanales sont réduites drastiquement au profit des taches de conception virtuelle et de contrôle de fabrication. Au-delà du temps consacré à la CAO puis à l’usinage, ce type de mise en forme assistée numériquement limite la durée de travail artisanal du prothésiste aux étapes éventuelles de collage des dents prothétiques, de maquillage gingival et au polissage. De plus, l’étape d’usinage du matériau peut être réalisée de nuit, en dehors des horaires d’activité du prothésiste ou déléguée à un centre externalisé de production, optimisant ainsi l’activité du laboratoire.
Une diversité des modalités de fabrication d’une PAC numérique par rapport au protocole conventionnel
Concernant la FAO de ces dispositif prothétiques, il est possible de choisir soit une méthode additive comme l’impression 3D (appelé également prototypage rapide, photo polymérisation en cuve, stéréolithographie ou impression par couches) en utilisant une imprimante, soit une méthode soustractive à l’aide d’une usineuse.
Ainsi, il a été proposé d’imprimer la base prothétique en utilisant de la résine PMMA photopolymérisable sous forme liquide pour réaliser la base prothétique (Fig.7 a à f) puis l’arcade dentaire avant de les solidariser par collage. Il est possible également de coller des dents prothétiques du commerce sur la base imprimée (Fig.8).
Plus fréquemment la mise en forme du matériau est réalisée par soustraction de matière dans des disques de résine colorée à l’aide d’une machine-outil à commande numérique (usineuse 5 axes). Dans cette situation, il est possible de choisir différentes stratégies de fabrication en fonction du matériau mis en forme :
En termes de qualité de production et de coûts, ces stratégies répondent à des besoins différents.
Une meilleure qualité de fabrication de ces PACs produites par FAO
Ainsi, d’après la revue de la littérature de Janéva et Coll.11 en 2018, des études in vitro montrent une meilleure fiabilité dimensionnelle et une moindre déformation des prothèses produites par usinage de disques en résine PMMA pré polymérisée par rapport à des techniques conventionnelles de mise en forme (résine pressée ou injectée). Les propriétés mécaniques des matériaux prothétiques ainsi usinées seraient supérieures pour la base ou au moins égales à celles des dents du commerce.
De même, l’usinage permettrait d’éviter les déplacements des dents artificielles rencontrés avec les procédés de mise en forme par pressée ou injection.
Enfin, en termes de biocompatibilité, une étude récente montre un taux de monomère résiduel beaucoup plus limité pour les résines utilisées en CFAO que pour celles mises en œuvre de manière conventionnelle 12.
Sur le plan clinique, l’adaptation précise de la base prothétique et l’état de surface obtenu par usinage se traduisent par un comportement plus favorable de la PAC vis-à-vis de la fibromuqueuse au cours du temps et par un joint prothétique plus efficace. Ainsi, l’évaluation par des cliniciens montrerait une rétention plus importante, une meilleure adaptation ainsi qu’une stabilité supérieure des PACS réalisées par un protocole numérique en comparaison de celles fabriquées de manière conventionnelle 11 .
Pour certains auteurs, l’évaluation par les patients traités à l’aide des 2 types de prothèse montre qu’ils seraient d’avantage satisfaits par le renouvellement de leur prothèse que par un mode de fabrication spécifique 13. Néanmoins, la quasi intégralité des publications concernant l’évaluation par le patient du confort et de l’efficacité masticatrice rapportent un comportement au moins égal et souvent supérieur des prothèses conçues et fabriquées avec assistance numérique par rapport à celui de celles issues d’un protocole de conception traditionnelle14,15.
Concernant la mise en forme additive par impression 3D, peu de données scientifiques sont accessibles mais il apparait qu’en termes de précision de fabrication, ce procédé serait moins performant que l’usinage16, même si certains auteurs interrogent la pertinence clinique des différences dimensionnelles rapportées dans ces études17.
De même, les propriétés mécaniques, la biocompatibilité en termes de taux de monomères résiduel ainsi que la stabilité colorimétrique de ces résines mise en forme par impression tridimensionnelle demandent à être évaluées plus en détails18. Pour Anadioti et Coll.19, l’impression 3D en PAC doit actuellement être réservée à la réalisation de PEIs, de gabarits d’essayage, de prothèse immédiate ou provisoire, car les résultats obtenus seraient moins performants, comparativement à l’usinage, pour réaliser une PAC d’usage.
La flexibilité de l’assistance numérique dans la conception et la « re production » prothétique
L’ensemble des données numérisées caractéristiques d’un cas clinique ainsi que le projet virtuel CAO correspondant à un PEI, une maquette d’occlusion ou à une PAC uni ou bi maxillaire sont généralement sauvegardées permettant ainsi de les utiliser à nouveau pour une nouvelle production.
Un deuxième jeu de prothèses complètes ou duplicata peut ainsi être fabriqué rapidement, sans nouvelle conception, et ceci indépendamment du délai entre les deux productions. Ceci représente un avantage notable par exemple dans les situations de réfection urgente liée à la perte ou la fracture d’une prothèse 11.
De plus, grâce à la numérisation au cabinet ou au laboratoire et à la facilité d’intégration des données cliniques existantes au sein d’un flux digital, il a été proposé différents protocoles de traitement avec assistance numérique, en fonction de la situation clinique et du projet prothétique envisagé (réfection de prothèses existantes, prothèse immédiate provisoire, traitement sans références prothétiques préalables…) 20.
Néanmoins, il doit être souligné également quelques limites de ces protocoles de traitement, de conception et de fabrication assistés numériquement.
Modernité des moyens ne signifie pas simplification clinique
Sur le plan clinique, ces protocoles de traitement optimisé ou écourté, apparemment très simples sont au moins aussi exigeant dans les étapes d’empreinte, d’enregistrement du rapport inter maxillaire, de situation des points et plans de référence.
Les techniques d’empreintes simultanées combinées avec l’enregistrement du rapport inter maxillaire à la DV choisie, décrites dans certains protocoles simplifiés utilisant des dispositifs originaux demandent un apprentissage et sont souvent aussi chronophages que les techniques conventionnelles. Ainsi quelques publications récentes13,21 signalent que la mise en place de prothèses réalisées avec ces protocoles cliniques accélérés a nécessité des modifications secondaires des bords prothétiques par des rectifications soustractives et/ou des remarginages périphériques afin d’améliorer leur rétention.
Par ailleurs, il est essentiel de noter que contrairement à une conception classique, le flux numérique permet moins de souplesse dans les modifications à apporter dans un montage après essayage clinique. Ainsi l’utilisation de gabarits imprimés permettant de sortir du virtuel afin de valider conjointement avec le patient, ce qui a été numériquement conçu à l’écran s’avère essentiel avant de finaliser la fabrication. Si des modifications de situation des dents, une imprécision dans la RIM ou la DV sont constatées, les modifications à apporter conduisent à modifier la CAO du projet et à valider à nouveau le montage rectifié avec un gabarit complémentaire, imposant une durée de traitement et des couts majorés. Au-delà de la courbe habituelle d’apprentissage de toute nouvelle procédure, ceci est un point essentiel à retenir en soulignant que la maitrise des concepts classiques de traitement en PAC s’avère un pré requis indispensable afin de limiter ces risques de réfection et maintenir une qualité du résultat thérapeutique similaire à celle d’un protocole traditionnel.
De la spatule à la souris, la transition prothèse réelle-virtuelle
Comme pour tout nouveau logiciel, il est nécessaire de consacrer du temps pour se familiariser avec son utilisation et de maitriser les différentes fonctions disponibles lors de la CAO puis en FAO même si beaucoup de commandes sont souvent intuitives ou automatisées.
Néanmoins le travail de conception à l’écran, souvent avec des vues agrandies d’une prothèse virtuelle, se traduit parfois par un résultat réel quelque peu différent du projet attendu en termes de volumes ou d’architecture. Au-delà de la courbe d’apprentissage cognitive, ceci demande une compétence, en termes de compréhension de cette transition entre le projet virtuel et réel, moins simple qu’il n’y parait en première intention.
Plus concrètement, en fonction du développement des algorithmes, les modifications de montages nécessaires afin d’obtenir le maximum de contacts bilatéralement équilibrés s’avèrent plus ou moins complexes et chronophages. Enfin, selon les logiciels de CAO, les modifications classiques de montage des dents dans les situations par exemple de forte Classe 2 avec suppression de PMs imposent parfois des stratégies exotiques afin d’obtenir le résultat escompté.
La pérennité du résultat obtenu au laboratoire
Certains auteurs ont signalé le vieillissement prématuré et la décoloration de certaines résines utilisées pour imprimer des bases prothétiques, ce qui a conduit à limiter leur indication à des prothèses amovibles transitoires18. De même, il a été rapporté des décollements des dents prothétiques sur les bases imprimées ou usinées18,19. Le respect des protocoles de collage en termes de traitement des surfaces à assembler et l’utilisation des colles recommandées en fonction des matériaux doivent permettre de limiter ces complications en rapport avec une intervention artisanale dans un protocole de production à assistance numérique.
L’impact financier au laboratoire et au cabinet dentaire
Au laboratoire, la mise en place de ces moyens de conception (scanner, logiciel de CFAO) et de réalisation (imprimante et machine à photopolymériser, usineuse 5 axes) pour les dents et les bases prothétiques, la maintenance de ces machines, ainsi que les matériaux consommables associés (fraises, résine liquide ou disques de PMMA) nécessitent des investissements ainsi que des couts de production plus élevés par rapport à ceux d’une chaine de fabrication conventionnelle.
Même si l’assistance numérique à la conception et à la fabrication permet de rationaliser significativement le temps de travail spécifique du prothésiste au laboratoire, la rentabilité du modèle économique de ces protocoles reste discutée. Particulièrement dans ces phases initiales de développements sur le marché, l’impact de ces couts sur le tarif de ces prothèses proposées par différents laboratoires et donc sur le montant des honoraires de traitement en PAC peut s’avérer un frein notable.
Ceci est d’autant amplifié sur le marché français par un tarif imposé par la convention actuelle concernant le traitement de l’édentement complet par prothèse amovible (PAC unimaxillaire CCAM HBLD031, 1 100€ / bi maxillaire CCAM HBLD035, 2 300€), et ceci quelles que soient les spécificités du cas clinique traité, des conditions d’exercice du praticien ou du mode de fabrication de la prothèse.
A titre de comparaison, une publication récente9 rapporte que les honoraires demandés pour un traitement par PAC bi maxillaire, numérique ou conventionnelle, réalisé par des étudiants en formation initiale dans une université publique suisse, varie de 2 190 à 3 350 Francs Suisse, correspondant d’après les auteurs, à un montant environ 40% moins élevé que celui payé en pratique privée. Après un rapide calcul, les honoraires de ce traitement par PAC en Médecine dentaire libérale suisse correspondent donc à une fourchette variant approximativement de 3 600€ à 5 500€, soit environ de 60% à 140% plus élevé que le tarif conventionnel français actuel.
Conclusion
L’apport des solutions numériques dans le traitement de l’édentement complet par prothèse amovible représente une avancée technologique significative soulignée par de nombreuses publications scientifiques.
L’avantage clinique apporté par une durée de traitement théoriquement plus courte doit être envisagé dans le cadre de cas simples ou le praticien maitrise à la fois les concepts traditionnels de traitement en PAC conventionnelle mais également les protocoles spécifiques décrits pour ces traitements assistés numériquement.
Au laboratoire, la conception virtuelle des prothèses s’avère une évolution majeure en termes de mode et de durée du travail de fabrication mais plus encore leur production constitue un progrès notable en termes de qualité des dispositifs prothétiques obtenus.
Concernant la thérapeutique prothétique de l’édentement complet par prothèse amovible, malgré les données actuelles de la science qui montre l’intérêt de ces protocoles, on ne peut que regretter qu’un des freins essentiels à leur développement dans l’exercice clinique quotidien réside dans l’inadéquation entre le tarif conventionnel et la réalité économique.
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