Les blocs céramiques pour usinages en CFAO directe

Dossier spécial AO#23 - La CFAO à la Faculté de Montpellier

Introduction

En 1985, le premier inlay réalisé par CFAO (1) a été usiné dans un bloc de céramique feldspathique (Vita mark I)(2). Depuis les années 80, différents systèmes ont été développés et ont ensuite évolués à travers une série de logiciels et d’équipements(3), (4). Ils offrent aujourd’hui la possibilité d’usiner des inlays, onlays, facettes, couronnes ou même des bridges et des piliers implantaires(5).

Initialement les matériaux devaient être suffisamment résistants tout en restant facilement usinables. Les céramiques feldspathiques étaient parfaitement adaptées à la réalisation de petits inlays occlusaux (CEREC 1)(2). Le désir d’étendre ce procédé de mise en forme à des restaurations de plus grande étendue (onlay, couronne) a orienté le praticien vers des matériaux plus résistants mécaniquement. Les céramiques renforcées ont été développées durant cette période. Pour conserver la facilité et la rapidité d’usinage, certaines d’entre elles sont proposées sous forme pré-cristallisée. Une cuisson de cristallisation sera alors nécessaire au matériau afin d’acquérir ses propriétés esthétiques et mécaniques finales. L’idée de proposer des matériaux plus souples et moins sujets à la fracture a aussi été développée. C’est la catégorie des résines, moins résistantes mécaniquement mais qui ont la capacité de se déformer, contrairement aux céramiques(6), (7). Les propriétés mécaniques de ces résines ont ensuite été dopées en y incorporant des particules de céramique. Actuellement, les industriels tentent de cumuler les avantages des deux principales familles de matériaux en réalisant une matrice de vitrocéramique, infiltrée de résine composite. Les métaux sont peu utilisés actuellement en CFAO directe, de par leur mise en œuvre difficile (frittage long et nécessité de posséder un four avec atmosphère d’Argon), ainsi que par leur mauvaise intégration esthétique. Leur description ne sera pas développée ici.

Désormais, les industriels proposent à la vente plus d’une vingtaine de blocs pour une utilisation « chairside » (au fauteuil). Ceux ci sont disponibles dans différentes tailles, teintes, translucidités et peuvent nécessiter des traitements post-usinage, différents en fonction du matériau. Les praticiens peuvent donc rencontrer des problèmes lors du choix du matériau à utiliser en fonction de la situation clinique, les communications commerciales ne facilitant pas ce choix.

Nous avons décidé de ne développer dans cet article que les céramiques et la nouvelle catégorie des hybrides.

 

Céramique

Fondamentaux

Kelly propose de considérer la céramique comme un matériau « composite »(8). Elle est formée d’une matrice (vitreuse ou polycristalline) dans laquelle sont incorporés en plus ou moins grande quantité des éléments additifs (« fillers »). Il s’agit soit de particules (cristallines ou vitreuses à haut point de fusion) soit d’atomes modifiés, appelés « dopants», pour les céramiques polycristallines(8), (9). Ils permettent une amélioration des propriétés mécaniques (« fillers ») ou une stabilisation de la structure polycristalline (dopants).

 

La matrice vitreuse confère les qualités esthétiques d’une céramique. Plus le taux de verre est important, plus la translucidité est importante, ce qui conviendra le mieux pour imiter les propriétés de l’émail et de la dentine(8). Cette matrice vitreuse permet la diffusion de la lumière pour une translucidité en profondeur. Les qualités mécaniques diminuent avec la phase vitreuse fragile, mais augmentent avec le taux de charges. Les charges sont autant de barrières à la progression des dislocations(10).

Les céramiques « à prédominance vitreuse » sont donc les céramiques aux meilleures propriétés esthétiques mais aux qualités mécaniques les plus faibles. Elles ne contiennent qu’une faible proportion de particules cristallines au sein de leur matrice de verre.

Les céramiques de verre renforcées présentent la même microstructure, mais dans des proportions de phases différentes. La proportion de charges sera plus importante au dépend de la matrice vitreuse. Cette microstructure permet un mordançage à l’acide fluorhydrique, laissant place à une microrugosité très élevée, augmentant significativement les valeurs d’adhésion lors de technique adhésive(11).

Les céramiques infiltrées, quant à elles, ont une microstructure propre. C’est pourquoi certains auteurs préfèrent distinguer les familles de céramiques suivantes(12), (13):

- les céramiques vitreuses (matrice vitreuse + particules cristallines dispersées),

- les céramiques cristallines infiltrées de verre (matrice cristalline majoritaire + verre infiltré),

- les céramiques polycristallines (sans matrice vitreuse).

 

La microstructure de la céramique conditionne donc ses propriétés mécaniques, optiqueset son aptitude au collage ; autant d’éléments essentiels quant au choix clinique(14).

Aujourd’hui, les céramiques vitreuses représentent la quasi totalité des céramiques usinables en CFAO directe. On distingue les céramiques feldspathiques et vitrocéramiques conventionnelles, des vitrocéramiques renforcées. Depuis peu, la zircone, sous certaines conditions, peut aussi être usinée directement au cabinet dentaire, afin de réaliser des restaurations monolithiques.

 

Une classification des céramiques utilisables en CFAO directe est proposée :

- Céramiques à prédominance vitreuse

- Feldspathique

- Vitrocéramique renforcée à la leucite

- Vitrocéramique renforcée au disilicate de lithium

- Vitrocéramique renforcée au silicate de lithium et zircone

- Céramique polycristalline

- Zircone

 

Céramiques à prédominance vitreuse : Céramiques feldspathiques et vitrocéramiques

 

Présentation

Les céramiques feldspathiques sont les premières céramiques à avoir été mises en forme par CFAO. Les vitrocéramiques conventionnelles, plus récentes, sont assimilées aux céramiques feldspathiques car leurs propriétés sont très proches ; seul le procédé industriel de fabrication diffère.

Les céramiques feldspathiques sont obtenues par simple mélange de poudre avant cuisson.

Les vitrocéramiques sont des matériaux mis en forme à l’état de verre puis traités thermiquement pour obtenir une cristallisation contrôlée et partielle. Ce traitement permet l’obtention de charges cristallines par dévitrification contrôlée de la matrice vitreuse chimiquement homogène. On obtient alors une structure à grain fin, très homogène. Ce procédé est appelé céramisation(9), (15).

Leur proportion de phase vitreuse importante (55 à 70%) leur confère une translucidité importante, et donc, des qualités esthétiques supérieures aux autres céramiques(16). Les caractéristiques mécaniques de ces céramiques sont insuffisantes pour résister aux contraintes en théorie. Les reconstitutions usinées dans ce matériau devront être collées pour augmenter cette force(17), (18). Il existe des blocs avec dégradés de teintes permettant de faire varier la saturation de la teinte et la translucidité du collet au bord libre.

Ces céramiques sont cependant particulièrement translucides et ne peuvent pas masquer correctement un moignon dyschromié ou un ancrage corono-radiculaire métallique.

 

Indications

Ces céramiques qui ont les propriétés esthétiques les plus importantes des blocs CFAO directe, sont recommandées lors de la réalisation de pièces prothétiques à fort impact esthétique. On peut donc réaliser avec ce matériau des facettes, des couronnes ainsi que des coiffes partielles, cavitaires ou pelliculaires(19).

 

Propositions commerciales

Le bloc Vita Mark II est un des plus anciens matériaux usinables en CFAO directe. Il est d’ailleurs considéré comme le « gold standard »(20). Il existe un grand recul clinique sur ce matériau, ainsi que de nombreuses études scientifiques. D’après certains auteurs, ces blocs fabriqués de manière industrielle auraient des propriétés supérieures aux céramiques pressées et artisanales(21), (22). Il existe des blocs ayant des couches de saturation différentes au sein d’un même bloc, permettant une intégration esthétique supérieure. Il existe un dernier type de bloc, le Real Life de chez Vita, possédant une structure tridimensionnelle, avec une teinte centrale « noyau dentinaire » et une teinte « émail » qui l’enrobe. Cette structure imite la construction naturelle d’une dent avec un dégradé de couleur curviligne entre la dentine et l’émail. Le logiciel de CAO va permettre de choisir la partie du bloc dans laquelle la restauration va être usinée, permettant une restauration monobloc à plusieurs transparences. Ce type de bloc a été développé spécifiquement pour les restaurations antérieures esthétiques.

 

L’Empress CAD (Ivoclar-Vivadent) est le seul représentant des vitrocéramiques conventionnelles en CFAO directe. C’est une vitrocéramique enrichie en cristaux de leucite.

 

Les cristaux de leucite font une taille de 1 à 5µm à l’intérieur de la matrice de vitrocéramique. Ces cristaux augmentent la résistance du matériau et ralentissent ou arrêtent les fissures, alors que la phase vitreuse absorbe l’énergie. Lors de la fabrication du bloc, la poudre est pressée afin d’obtenir le maximum d’homogénéité. La résistance à la flexion est de 160MPa(5).

 

Mise en forme et finition

Il existe différentes méthodes de traitement de la pièce prothétique une fois celle ci usinée.

- Polissage : un polissage mécanique réalisé à la pièce à main, permet de conserver l’état de surface de la céramique. En microscopie à force atomique, l’état de surface poli est celui qui présente le moins de rugosité de surface par rapport au glaçage et à la dent naturelle(23).

-  Maquillage : aide à obtenir les caractérisations spécifiques présentes sur les dents voisines(23).

- Glaçage : l’utilisation de glazure permet d’apporter une brillance naturelle, bien supérieure à un simple polissage mécanique. Les processus de cuisson et de glaçage améliorent les propriétés mécaniques de la pièce non seulement par une éventuelle cristallisation (vitrocéramiques renforcées), mais aussi par oblitération d’éventuelles microfissures causées par l’usinage(24).

- Cut-back : la pièce prothétique monobloc est évidée sur sa partie vestibulaire et/ou incisale grâce au logiciel de CAO. Cette zone stratégique est ensuite stratifiée par le prothésiste afin de réaliser une personnalisation (mamelons, bords libre). Cette technique ne se réalise que sur les dents antérieures, lors d’une attente esthétique importante(25).

Après glaçage ou polissage, on a une diminution de l’abrasion d’émail face à la céramique. La perte d’émail devient alors quasi équivalente à celle du matériau(26)–(28).

 

Vitrocéramiques renforcées

 

Les différentes céramiques

Les vitrocéramiques renforcées, possèdent la même structure biphasée que les vitrocéramiques décrites auparavant. Cependant la proportion de phase cristalline est fortement augmentée. La matrice de verre quant à elle est réduite à 30% du volume (12).

Les vitrocéramiques peuvent être renforcées par différents types de charges :

- Disilicate de lithium : e.max CAD, Ivoclar-Vivadent

- Silicate de lithium et dioxyde de zirconium : Suprinity (FC), Vita ; Celtra, Dentsply

 

Ces céramiques présentent une résistance à la flexion améliorée, avec de bonnes propriétés optiques, et plusieurs niveaux de translucidité et de teinte(11). Leur résistance mécanique est considérablement augmentée lorsqu’elles sont collées sur l’émail, elle atteindrait 70% de la résistance de la zircone(29).

 

Les vitrocéramiques renforcées au disilicate de lithium ne sont disponibles en CFAO directe qu’avec l’e.max CAD d’Ivoclar-Vivadent. Les blocs à usiner se présentent dans une phase de métasilicate pré-cristallisé. Une fois mis en forme, une cuisson de cristallisation finale va dissoudre les cristaux de métasilicate, alors que ceux de disilicate vont subir une transformation et une croissance réticulée, créant ainsi une sorte de maillage armant le corps de la céramique. Les vitrocéramiques renforcées en silicate de lithium et dioxyde de zirconium sont disponibles à l’état pré-cristallisé (facilement usinable mais avec une teinte intermédiaire), ou totalement cristallisé (usinage plus difficile mais présentant la teinte finale). Elles contiennent 10% de dioxyde de zircone dissous dans la phase vitreuse de la céramique(30).

 

Indications

Ce type de céramique présente des qualités optiques élevées, avec plusieurs niveaux de teinte et de translucidité, permettant d’obtenir des reconstitutions prothétiques esthétiques(11).

 

Elles peuvent être utilisées pour réaliser des restaurations monolithiques telles que : facettes, inlays/onlays, endocouronnes, couronnes antérieures et postérieures, ainsi que des bridges de petite étendue en antérieur et ceci uniquement pour le disilicate de lithium(19).

 

Ces matériaux sont disponibles pour réaliser des piliers implantaires, mais il n’existe pas d’évaluation clinique suffisante à l’heure actuelle pour valider cette indication(11) . Ce type de matériau semble très prometteur.

 

Mise en œuvre

Selon le stade de cristallisation auquel le bloc est usiné, la pièce prothétique nécessite une phase de cristallisation post usinage. C’est le cas pour l’e.max CAD (Ivoclar-Vivadent) et le Suprinity (Vita). Un maquillage peut être réalisé avant cette cristallisation, permettant de réaliser un glaçage durant la même cuisson. Les autres céramiques telles que le Suprinity FC (Vita), et le Celtra (Dentslpy) peuvent être collées directement après usinage, après une phase de polissage. Si un maquillage est réalisé, une cuisson de glaçage est alors nécessaire malgré l’état déjà cristallisé.

 

Le disilicate de lithium ne peut être considéré comme une céramique d’infrastructure, au même titre que la zircone ou l’alumine, malgré ses propriétés mécaniques. Elle peut être utilisée comme céramique esthétique sur une armature céramique ou métallique. Cependant, certains laboratoires proposent de réaliser des restaurations avec infrastructure en disilicate de lithium, stratifiées de céramique feldspathique.

 

Zircone

Présentation du matériau

 

La zircone pure, ou oxyde de zirconium (ZrO2) n’est pas utilisable comme céramique dentaire (13), (31). Lors du refroidissement, la transformation de la phase tétragonale (haute température) en phase monoclinique (basse température) s’accompagne d’une augmentation de volume d’environ 3 à 4 % avec apparition de fissures dans le volume de la pièce de zircone pure qui peut ainsi se fracturer à température ambiante(32).

La solution fut donc de doper cette zircone avec des oxydes (Magnésium, Cérium, Yttrium). Si l’on ajoute à la zircone pure trois moles % d’Yttrium, on stabilise la phase tétragonale à température ambiante et l’on obtient une zircone dite 3Y-TZP (Zircone Polycristalline Tétragonale dopée de 3 moles % d’Yttrium) qui contient jusqu’à 98 % de phase tétragonale.

 

Cette zircone Y-TZP est thermodynamiquement métastable. Elle peut subir une transformation cristalline (t en m) sous l’effet, par exemple, de contraintes mécaniques(31). L’avantage de la transformation t en m à température ambiante est l’augmentation de la résistance à la fracture (ténacité) du matériau(33). Si une fissure apparaît dans le matériau, elle va entrainer une concentration de contraintes à son extrémité. Ces contraintes vont déclencher la transformation t en m caractérisée par augmentation de volume des cristaux (environ 4 %) qui évite la propagation de la fissure(9).

 

La transformation t en m est irréversible à température ambiante et n’est réversible que par un traitement de recristallisation qui implique un chauffage du matériau entre 900°C et 1000°C. C’est pourquoi cette propriété d'« autoréparation » ne peut être exploitée qu’une seule fois à la température de la cavité orale. Il y a donc un vieillissement localisé du matériau(12).

 

Les céramiques polycristallines à base de zircone ne peuvent être mises en forme que par usinage (excepté le cas particulier du système Procera, qui ne sera cependant pas traité ici, car non utilisable en CFAO directe).

 

Elles peuvent se présenter sous deux formes (12), (34):

- Dense (HIP : Hot Isostatic Pressure) : elle est totalement fritée et difficilement usinable. Elle n’est pas accessible en CFAO directe.

- Poreuse (CIP : Cold Isostatic Pressure) : elle n’est que pré-frittée (partiellement fritée) et facilement usinable, car préfrittée elle n’a pas atteint sa dureté définitive.

 

Pour le cas de forme poreuse, après l’usinage, le frittage complet conduit à une rétraction du matériau de 20 à 30% en volume, qui doit être prévu en sur dimensionnant la pièce lors de l’usinage(35). L’usinage de blocs pré-frittés prévient la transformation t en m induite par les contraintes mécaniques. L’usinage de blocs totalement frittés peut provoquer l’apparition de microfissures et de cristaux monocliniques conduisant à une plus grande susceptibilité à la dégradation à basse température et au vieillissement en fatigue(34).

 Cependant les études cliniques ont mis en évidence que les restaurations usinées à l’état pré-fritté montraient plus de fractures(36). Les défauts inévitablement créés lors de l’usinage de la zircone pré-frittée ne sont pas totalement éliminés par la cuisson de frittage(37). Les zircones peuvent être proposés avec des caractéristiques de hautes translucidités, grâce à des cristaux de petite taille, ce qui permettrait une translucidité plus importante par rapport à la zircone classique(38). Cependant, nous avons vu auparavant que la translucidité était due à la phase vitreuse des céramiques. Nous pouvons donc légitimement nous poser la question sur cette translucidité de la zircone, étant donné l’absence de phase vitreuse au sein de celle-ci.

 

Indications

Les restaurations en zircone monobloc, destinées à une utilisation « chairside », sont très récentes. Il existe peu de recul clinique sur ce genre de restauration. Il semblerait que l’on ne puisse réaliser que des coiffes totales, ou des bridges de petite étendue (3 éléments maximum). La microstructure de ce matériau ne permettant pas son mordançage, les éléments prothétiques produits devront être scellés. Pour les constructeurs, ce matériau nécessite un support ne présentant pas d’angles vifs afin de ne pas risquer de fractures. Il a été démontré in vitro, que l’état de surface est le principal facteur de l’abrasion de l’antagoniste. Une reconstitution en zircone monobloc polie de manière précise et soigneuse ne serait pas plus abrasive qu’une autre céramique dentaire(39)–(41). La société Sirona propose des blocs zircone compatibles avec les unités d’usinages chairside destinée à être frittées dans un four spécifique en 18 mn seulement (Fig. 3)

Mise en œuvre

La pièce prothétique est usinée légèrement surdimensionnée, selon le bloc utilisé, pour compenser la rétraction au frittage. Ce frittage dure environ 400 minutes dans un four atteignant plus de 1500°C. Un glaçage peut ensuite être nécessaire afin de caractériser la prothèse.

 

Hybride

 

Présentation du matériau

Il n’existe actuellement qu’un seul matériau hybride sur le marché, à savoir le Vita Enamic. Ce matériau est composé d’un réseau de vitrocéramique renforcé à l’albite (86 %) poreux infiltré sous très haute pression et haute température d’un polymère (UDMA) créant un composite à phases interpénétrées. Il y a donc présence d’un double réseau vitrocéramique/UDMA(11), (19). Les performances mécaniques de ce matériau sont similaires aux vitrocéramiques, mais présentent une résilience beaucoup plus élevée. Il présente aussi une meilleure résistance à l’usure par rapport aux résines composites(42), (43). Ce matériau possède une bonne aptitude au collage grâce à sa microstructure. Les pièces usinées peuvent être de faible épaisseur, la restauration ne présentera pas d’éclats, l’interpénétration des phases du matériau empêche la propagation de fissure au sein du matériau(44), (42). Le réseau de céramique continu favorise la circulation de la lumière, ce qui accroit les performances optiques de ce matériau(44).

Cependant, nous disposons d’un recul clinique assez faible sur ce matériau, étant donné sa sortie récente. Des études cliniques sur le long terme doivent être réalisées.

 

Indications

Ce matériau est indiqué pour des facettes, inlays/onlays, couronnes unitaires antérieures et postérieures, et sur implant. Cependant, il serait plus indiqué pour les reconstructions postérieures, ce bloc ne présentant pas de dégradé de teinte, le résultat esthétique n’étant obtenu que par maquillage(44), (45).

 

Mise en œuvre

Ce nouveau type de matériau possède un bon comportement à l’usinage, les pièces prothétiques produites sont donc très précises. De plus sa structure permet une usure moindre des fraises de l’usineuse(11). Il ne nécessite pas de traitement thermique post usinage, un simple maquillage peut être réalisé éventuellement avant collage(45).

 

Bilan

 

Les différents matériaux mis à notre disposition en CFAO directe ont chacun leurs avantages et leurs inconvénients. Les résines sont de plus en plus performantes, mais leur biocompatibilité reste à démontrer, et leur intégration esthétique peut s’avérer difficile (maquillage délicat). L’apparition récente de la catégorie des hybrides est intéressante, mais le faible recul clinique ne permet pas de valider les indications de ce nouveau type de matériau. L’offre de plus en plus importante des fabricants, ainsi que les publicités parfois réductrices et à visée purement marketing, sont souvent sources de confusions. Le matériau unique, adapté à toutes les configurations cliniques n’existe pas. Le praticien devra choisir en fonction de ses connaissances, de son expérience et surtout du cas clinique. La simplification du choix du matériau, en ne tenant compte que de la dualité esthétique/résistance est réductrice. Les valeurs de résistance, données par les constructeurs, ne correspondent pas toujours à une réalité physiologique, et l’in-vitro n’est pas toujours superposable à la réalité clinique. Les capacités de dissipation et d’accommodation des contraintes après collage, la géométrie des préparations en adéquation avec le matériau de reconstruction(46) sont autant d’éléments de première importance qui doivent guider le praticien dans son choix et être pris en compte, avant d’insérer le bloc dans l’usineuse.

 

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