Questions - Réponses aux industriels

Dossier spécial AONews : Une photographie de l'implantologie en France

AONews #22 - Novembre 2018


Je voudrais tout d’abord remercier la rédaction pour cette initiative créant une opportunité d’échange supplémentaire entre industriels et cliniciens qui, je l’espère, clarifiera certains aspects questionnant profondément l’art dentaire aujourd’hui.

 

L’avènement de l’implantologie orale et la ruée des marques ont en effet démultiplié les segments de marché. Les sociétés low-cost d’hier dont nous faisions partie, celles qui ont « cassé » les codes en « démocratisant » et en « désacralisant » l’implantologie, ont d’abord suscité la méfiance, mais sont devenues des acteurs plus innovants qu’hier, qui n’ont cessé de professionnaliser leur démarche. Ainsi, le segment du pur low-cost a été investi par d’autres sociétés plus jeunes qui peinent à se développer face à des praticiens dont les critères de choix restent massivement la fiabilité, la qualité et la pérennité de la marque. L’écart s’est lissé entre les sociétés premium et les fabricants français, en matière de recherche, d’innovation et de validation, les premiers étant contraints de suivre un rythme imposé par la concurrence, les deuxièmes étant pressés par la règlementation pour présenter toutes les évaluations cliniques imposées par les organismes de certification.

 

Si le secteur ne parait pas suffisamment règlementé aujourd’hui, les fabricants devront bientôt satisfaire aux nouvelles exigences qui rentreront en application dès le 26 mai 2020. Le nouveau règlement sur les dispositifs médicaux (2017/745 / UE) (MDR) et le règlement sur les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro (2017/746 / UE) (IVDR) alignent en effet la législation de l'UE sur les progrès techniques, les évolutions de la science médicale et les progrès réalisés en termes de loi. Le MDR créera un cadre réglementaire solide, transparent et durable, reconnu internationalement, qui améliorera la sécurité clinique et créera un accès équitable aux marchés pour les fabricants. Par rapport aux directives actuelles, le MDR met davantage l’accent sur la sécurité fondée sur le cycle de vie, et étayée par des données cliniques. Lyra ETK se prépare à cette échéance avec de nouvelles ressources au sein de son service « qualité, affaires règlementaires ».

 

Notre projet de société se définit autour de deux enjeux majeurs abordés dans cette enquête, d’une part la digitalisation de la profession, d’autre part la maintenance implantaire et la prise en compte de la prévalence de la péri-implantite.

 

Notre vision de la digitalisation des cabinets est celle d’une transformation aussi incontournable que celle qui a révolutionné la photographie, la téléphonie, … et qui est à considérer comme une évolution sociétale globale qui touchera tous les corps de métier, même si elle laisse sceptiques un grand nombre de praticiens qui n’en voient pas les bénéfices patient.

 

Il faut dire que les solutions digitales ont été présentées de façon très industrielle depuis de nombreuses années, sans que les praticiens puissent en apprécier le sens et la façon dont cela pouvait changer leur proposition de soin. S’équiper d’un scanner intra-oral a été, pour les précurseurs, motivé par la passion de leur métier et une volonté d’être toujours à la pointe de l’innovation. Mais quel service/ bénéfice cela apporte-t-il dans la pratique quotidienne ? L’utilisent-ils vraiment et à quelle fréquence ? Quel est l’état d’aboutissement de ces solutions numériques, leur véritable apport dans la pratique et pour les patients ?

 

En implantologie, le numérique a toujours été synonyme de complexité et de surcoût. Jusqu’à présent, la chirurgie guidée, avec l’intégration d’un logiciel de planification, le temps passé et l’achat d’un guide, augmentaient significativement le devis pour le patient. Les piliers personnalisés et esthétiques réalisés en CFAO sont traditionnellement plus chers que des piliers standards du catalogue.

 

Or s’il est un domaine où la digitalisation prend tout son sens aujourd’hui, en devenant source d’accessibilité autant que de fiabilité/qualité avec un véritable bénéfice patient, c’est bien en implantologie ! i physio en est la parfaite illustration. Il permet de proposer un protocole full digital plus compact, où les manipulations de dévissage (et par voie de conséquence les interventions sur les tissus mous) sont réduites. La digitalisation des traitements implantaires trouve alors tout son sens : moins de temps passé par implant (gain de temps d’environ 30 mn), confort patient, esthétique avec le maintien des papilles, respect biologique et réduction du risque de contamination, … Un grand nombre d’avantages qui vient résoudre l’équation bien compliquée avec laquelle nous devons souvent composer aujourd’hui (rapport coût/qualité), mais peut-être aussi une mesure préventive dont l’efficacité reste à évaluer dans la durée, pour lutter contre la péri-implantite.

 

La maintenance des traitements implantaires est un aspect majeur qui émerge alors que nous commençons à avoir davantage de recul et devons faire face au vieillissement avéré de la population. L’OMS a publié le 24 mai 2016 son plan stratégique mondial contre l’âgisme intitulé « vieillir en restant actif et en bonne santé », preuve que cette évolution démographique est suffisamment significative pour susciter de nouveaux services de santé dédiés. L’état de surface est au cœur du sujet de la péri-implantite en raison de ses caractéristiques plus ou moins rétentives. D’autres préconisent l’émergence d’une activité spécialisée de « péri-implantologue »… A notre niveau de fabricant, faut-il se contenter d’adapter nos états de surface en fonction du degré d’« exposition » des différentes zones de l’implant ? Un tel implant suffira-t-il à couvrir l’allongement de la durée de vie de nos patients ? Faut-il penser à un implant de seconde intention aux caractéristiques adaptées, notamment en termes d’état de surface, à la qualité osseuse « dégradée » des seniors ?

Une conclusion en forme de question, une de plus dans un monde changeant où l’agilité et la vitesse se heurtent souvent aux exigences propres aux dispositifs médicaux.