Bruno Gogly Créteil
Nous avons créé au sein du service une unité fonctionnelle qui regroupe plusieurs activités dont : la PASS bucco-dentaire (Permanence d’Accès aux Soins de Santé), le CCMR orale (Centre de Compétence des Maladies Rares orales) et des recherches cliniques dont l’étude Européenne MAXIBONE débutée en 2018. La PASS doit répondre aux missions d’accueil et de prise en charge de « patients en situation de renoncement aux soins bucco-dentaires pour des raisons financières ». Créée en 2011 et financée par l’ARS IdF (Agence Régionale de Santé d’Île de France), elle permet la réalisation de tous les soins chirurgicaux, conservateurs et prothétiques.
Les patients sont adressés par des partenaires associatifs ayant contracté des conventions avec l’APHP (Aide Odontologique Internationale, le bus dentaire, Emmaüs, Médecins du Monde, Samu social…), par des services hospitaliers, médicaux ou sociaux, ou le plus souvent par l’intermédiaire de la consultation d’urgences de jour du service et des urgences de l’hôpital (PASS des urgences). Une assistante sociale est dédiée à cette activité, l’objectif plus général étant que les patients obtiennent des droits permettant une prise en charge médicale classique. Les premières consultations sont réalisées par les praticiens hospitaliers du service, puis les soins réalisés par les stagiaires en fin de formation, les internes et les praticiens hospitaliers. Lorsque le contexte psychosocial du patient le nécessite, les soins sont délivrés par les seniors. On note sur Henri Mondor la présence de trois PASS (médicale, psychiatrique et dentaire) ce qui permet une synergie dans la prise en charge médico-sociale de la précarité. La PASS dentaire a pris en charge la réhabilitation orale complète de 473 patients en 2017.
Le CCMR a été labellisé en 2017 par la DGOS (Direction Générale de l’Offre de Soins). Les malformations orales concernent 60 % des 2156 pathologies répertoriées par la plateforme TETECOU : 1054 avec malformation des arcades dentaires (40 dentaires isolées) et 368 de la cavité buccale. Elles affectent un ensemble composite : squelettique, musculo-nerveux, muqueux assurant la fonctionnalité masticatoire, de déglutition, de respiration, d’élocution et contribuant à l’expression faciale.
Pour nos patients et dans la littérature internationale, nous constatons que les phénotypes isolés d’un type tissulaire donné sont exceptionnels voire inexistants, les mutations des mêmes gènes étant à l’origine de phénotypes syndromiques et isolés (Dlx3 syndrome tricho-dento-osseux vs amélogenèse imparfaite isolée) et les molécules multifonctionnelles affectées générant des troubles souvent structuraux mais aussi métaboliques. On peut classer en 4 grands groupes les maladies rares orales : pathologies développementales, pathologies ectodermiques, pathologies mésodermiques et osseuses et autres poly-pathologies. La lourdeur malformative demande une culture thérapeutique en dysmorphologie dépassant le cadre de l’odontologie ainsi qu’une maîtrise de l’articulation de plusieurs spécialités, chirurgies orales et maxillofaciale, médecine bucco-dentaire et orthodontie dès la petite enfance et tout au long de la croissance pour générer une morpho-fonctionnalité adulte optimale. Une culture sémiologique large est indispensable par le nombre des portes d’entrée buccale des syndromes.
L’hôpital Henri Mondor accueille 19 centres de maladies rares ce qui crée des partenariats et une prise en charge facilitée des patients. Une fédération des centres de maladies rares du groupe hospitalier a été créée en 2018.
L’étude clinique MAXIBONE (programme Européen H2020) a débuté en 2018 et se déroulera sur 4 ans. Cette étude multicentrique humaine a pour objet la reconstruction des maxillaires par thérapie cellulaire autologue (BM-MSCs) et l’utilisation d’un biomatériau innovant (granules BCP et membrane PLGA) qui possède un marquage CE (partenariat société MIMETIS). La pose d’implants dentaires (partenariat société STRAUMANN) permettra la réhabilitation prothétique. C’est une étude randomisée qui comporte 50 patients témoins (greffe os autologue) et 100 patients traités par thérapie cellulaire. Chaque année 4 à 6 millions d’implants dentaires sont placés en Europe. Cependant dans 10 % des cas la hauteur d’os maxillaire est insuffisante, ce qui constitue une impossibilité de traiter les patients. Ainsi il est estimé que 350 000 patients bénéficieront d’une augmentation du volume osseux en 2023 en Europe avant reconstruction implantaire.
Cette étude coordonnée par le Docteur Pierre Layrolle (INSERM Nantes), financée par l’Europe, est un partenariat de services cliniques, industriels, laboratoires de recherche et établissements européens publiques labellisés dans la production de cellules-souches. Elle regroupe donc neufs équipes cliniques situées en Allemagne, Norvège, Danemark, Espagne, France, trois sites de productions de cellules-souches autologues (Allemagne et France) et deux partenaires industriels pour la fabrication du biomatériau et l’étude animale (société Mimetis, Espagne), et la production d’implants dentaires (Straumann). L’EFS IdF (Établissement Français du Sang Île de France, Pr Hélène Rouard) situé sur Henri Mondor est un partenaire privilégié et l’étude dans le SSERD est dirigée par le Pr Bruno Gogly. Une étude chez l’animal par reconstruction osseuse (imprimante 3D) avec le même matériau se fera parallèlement.